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“Investir dans l’industrie manufacturière : Une urgence stratégique pour Maurice.”

Forum de l’AMM

Depuis trois décennies, l’Association of Mauritian Manufacturers (AMM) œuvre à la promotion et à la défense de l’industrie locale à travers des actions structurantes pour le secteur, un plaidoyer actif et des partenariats stratégiques. Parmi les activités de plaidoyer, l’AMM a organisé un Forum stratégique le jeudi 15 mai 2025, à WeCycle, Zone Industrielle de Riche Terre. Ce forum s’inscrivait comme une réflexion collective à l’occasion des 30 ans de l’AMM. Placé sous le thème « Investir dans l’industrie manufacturière : Une urgence stratégique pour Maurice », il visait à mobiliser les décideurs économiques, institutionnels et industriels autour des défis et opportunités du secteur. 

Dans un contexte où le manufacturier ne capte que 4 % des investissements nationaux, malgré son rôle crucial dans la création de valeur et d’emplois, ce forum entendait ouvrir le débat sur les leviers à activer pour repositionner l’industrie au cœur de la stratégie de développement du pays.

« Dans un monde instable, soumis aux tensions géopolitiques et aux ruptures logistiques, produire localement n’est plus une simple option stratégique. C’est devenu une exigence vitale. Les grandes puissances réindustrialisent. Et nous ? Allons-nous rester spectateurs ? À l’AMM, nous faisons un choix clair. Nous proposons un cap : tripler les investissements industriels pour atteindre 20 à 30 milliards de roupies par an. Cet objectif est atteignable. Mais il nécessite un cadre adapté, un environnement stable, une vision politique affirmée… Nous n’en sommes pas à la première marche. L’industrie bouge déjà. Elle se transforme. Elle innove », a avancé Shirin Gunny, CEO de l’Association of Mauritian Manufacturers (AMM).

Ce choix de tenir l’événement chez WeCycle, entreprise spécialisée dans le recyclage, est un signal fort. Il incarne la volonté de l’AMM de replacer l’économie circulaire au cœur des priorités industrielles. En valorisant les acteurs du recyclage comme de véritables manufacturiers, l’AMM affirme que l’avenir de l’industrie passe aussi par des modèles durables, innovants et régénératifs.

« Pourquoi ce thème est-il si important ? Parce que l’industrie manufacturière ne peut plus être pensée uniquement en termes de production. Elle est aujourd’hui au cœur des défis économiques, sociaux et environnementaux de notre pays. Elle doit être un moteur de résilience, d’innovation, de souveraineté, et de durabilité. Chez WeCycle, nous croyons profondément que produire localement, transformer nos ressources au lieu de les exporter ou de les jeter, et créer de la valeur à chaque étape de la chaîne, est non seulement possible, mais nécessaire », a affirmé Yannick Merven, directeur de WeCycle, dans son discours de bienvenue.

 

« Dans un monde instable, soumis aux tensions géopolitiques et aux ruptures logistiques, produire localement n’est plus une simple option stratégique. C’est devenu une exigence vitale.»

 

Parmi les réalisations majeures figure le lancement en 2013 du label Made in Moris, véritable catalyseur de valorisation du savoir-faire local. Aujourd’hui, ce label regroupe plus de 200 entreprises, dont 60 % de PME, et rassemble plus de 400 marques et 4000 produits issus de huit secteurs d’activité. Au-delà de la visibilité des produits mauriciens, l’AMM a su bâtir une stratégie d’accompagnement pour l’industrie, notamment avec le programme Lindistri Dime, qui outille les entreprises pour opérer leur transition écologique et technologique, ou encore le programme En Route Vers le Made in Moris, qui permet aux MPME de s’engager vers l’obtention du label Made in Moris.

Une table ronde stratégique

La table ronde du Forum a été animée par Yannick Applasamy, ancien président de l’AMM et Chief Operating Officer de Xtruline Ltd. Ce dernier a modéré les échanges entre des experts venus croiser leurs regards et opinions sur l’investissement industriel et les leviers de croissance du secteur.

 

« L’industrie manufacturière ne peut plus être pensée uniquement en termes de production. Elle est aujourd’hui au cœur des défis économiques, sociaux et environnementaux de notre pays. Elle doit être un moteur de résilience, d’innovation, de souveraineté, et de durabilité.»

 

Le panel d’intervenants a réuni Amédée Darga, Managing Director de Straconsult, Julien Warlouzé, Associate Director chez EY Parthenon, Jérôme Lagesse, Managing Partner d’Inside Capital LTD, et Lawrence Wong, président de l’AMM et CEO d’Aryze.

Cette table ronde s’inscrit dans la dynamique qui place la relance de l’investissement industriel au cœur de son action de plaidoyer. En 2024, le secteur représente déjà 12,7 % du PIB en contribution directe et près de 20 % en intégrant les effets indirects, avec une croissance remarquable : sa valeur ajoutée est passée de Rs 31,7 milliards en 2004 à Rs 76,9 milliards en 2024, soit une hausse de 142 %. C’est aussi une force motrice pour l’emploi, soutenant 90 000 emplois directs et jusqu’à 200 000 emplois indirects. Aujourd’hui, près de 2 emplois sur 5 à Maurice sont liés à l’industrie manufacturière.

« Les vulnérabilités sont là, sous nos yeux. Et Maurice ne peut plus rester dans l’entre-deux. Il faut un sursaut. Une mobilisation. Un alignement des planètes : industriels, politiques publiques, institutions, partenaires… pour qu’on puisse faire plus, plus vite, plus intelligemment. On ne parle pas ici d’un plan à 5 ans dans un tiroir. On parle d’actions concrètes, de réformes ciblées, de financements adaptés, d’un cap industriel assumé », a soutenu Vanessa Doger de Speville, Head of Sustainability, Reputation & Engagement, MCB Ltd. 

Les Domestic Oriented Manufacturing Enterprises (DOME), souvent oubliées dans les débats économiques, ont généré Rs 50,4 milliards, contre Rs 21,2 milliards pour les entreprises orientées export (EOE). La croissance des DOME a atteint 54 % entre 2017 (Rs 32,7 milliards) et 2023 (Rs 50,4 milliards). Les DOME représentent ainsi une base industrielle stratégique à consolider pour renforcer la souveraineté économique du pays.

 

« Il faut un sursaut. Une mobilisation. Un alignement des planètes : industriels, politiques publiques, institutions, partenaires… pour qu’on puisse faire plus, plus vite, plus intelligemment.»

 

L’AMM entend également déconstruire les idées reçues sur l’industrie, souvent perçue comme polluante. Ses membres sont déjà engagés dans une démarche de production responsable, avec des programmes tels que Lindistri Dime, qui a couvert des sujets aussi divers que l’écoconception, la ‘supply chain’ durable, l’automatisation et l’intelligence artificielle. L’association a mis en œuvre des formations en ‘sustainability’ pour les marques locales, ainsi que la Responsabilité Élargie du Producteur (REP) dans la filière plastiques. L’AMM est aussi cofondatrice du Club de l’Économie Circulaire de Business Mauritius, et rappelle que les recycleurs sont à juste titre classés comme des manufacturiers à part entière, ce qui justifie pleinement le choix du lieu du Forum chez WeCycle.

 

Budget :  Les mesures phares proposées par l’AMM

  1. Incitations fiscales ciblées pour stimuler l’investissement productif
  • Mise en place d’un taux d’imposition réduit à 3 % pour les entreprises manufacturières, afin de soutenir la relance industrielle et favoriser la création de valeur locale.
  • Introduction d’un mécanisme de récupération de TVA pour les investissements productifs (équipements, machines, technologies, panneaux photovoltaïques pour une transition énergétique efficace et concrète, par exemple), incluant les outils de digitalisation et d’intelligence artificielle, afin d’accélérer la transformation technologique du tissu industriel mauricien. La transformation numérique de nos entreprises est une priorité.
  1. Accélération de l’économie circulaire par des leviers fiscaux et budgétaires
  • Instauration de subventions à la tonne pour le recyclage local et à l’export :
  • Rs 15/kg pour les plastiques recyclés exportés
  • Rs 30/kg pour les plastiques et verres recyclés localement
  • Exonération de TVA sur les intrants ou produits issus du recyclage local, pour encourager la transition vers des chaînes de valeur circulaires et réduire la dépendance aux matières premières importées.
  1.  Faire émerger des champions industriels mauriciens
  • Accompagner la montée en puissance d’un tissu d’entreprises locales compétitives, innovantes et résilientes, capables de répondre aux défis économiques, technologiques et environnementaux de demain.
  • Cela implique un soutien structurant à la professionnalisation, à la transformation digitale, à l’intégration de l’intelligence artificielle, ainsi qu’à l’investissement productif et durable.
  • Ces champions industriels seront les piliers d’une économie circulaire, bas carbone et souveraine, tournée vers l’exportation et ancrée dans les réalités mauriciennes.
  1. Valorisation stratégique du label Made in Moris à l’aéroport (mesure figurant dans le budget 2023, mais jamais concrétisée)
  • Lancement de la boutique Made in Moris à l’aéroport, en partenariat public-privé, pour promouvoir les savoir-faire nationaux et améliorer la visibilité de l’industrie locale auprès des voyageurs et partenaires internationaux, mais aussi contribuer à faire valoir Maurice comme destination engagée dans le développement durable.
  • Lancement d’une campagne nationale sur le Made in Moris comme vecteur de fierté, mais aussi comme rappel de son rôle important en tant que pilier de notre économie.

 

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