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Maître Eric Ribot, avocat

Une stratégie nationale pour la digitalisation du judiciaire

Nous sommes en 1780. Un certain Monsieur Loustau remporte son cas devant la cour de cassation, en France. Deux ans seulement après avoir été condamné et démis de ses fonctions à l’Isle de France, il est réinstauré à son poste. Ce cas a attiré l’attention de Me Eric Ribot, qui nous parle, dans cette édition de BIZWEEK, de la nécessité d’une digitalisation complète du judiciaire mauricien, dans l’intérêt des justiciables. 

 

Texte : Rudy Veeramundar | Photos : Manoj Nawoor

Maître Eric Ribot, avocat
Maître Eric Ribot, avocat

Nous sommes à l’ère de la transformation digitale et de l’intelligence artificielle. Quelle est la place du judiciaire et des cours de Justice dans cette transformation ?

Nous avons un long chemin à parcourir. Nous avons besoin d’une transformation technologique efficace dans le système judiciaire, surtout en ce qui concerne la technologie des salles d’audience. Pour cela, il faut une planification et une stratégie bien organisées et complètes au niveau national, avec les ressources nécessaires pour investir dans l’infrastructure et les outils qu’il faut, ainsi qu’un plan clair.

L’avenir arrive à grands pas, mais notre place dans cet avenir n’est pas garantie. Ça dépendra de notre volonté d’adopter de nouvelles technologies. Il y a une transformation numérique mondiale, une vraie révolution, qui est déjà là. Les tribunaux du monde entier doivent se préparer pour pouvoir l’implémenter et rester pertinents. 

 

Lors de la préparation de cette interview, vous abordiez la question de la digitalisation du judiciaire en évoquant un cas qui date du 18e siècle. Pouvez-vous nous en situer le contexte?

J’ai une passion pour l’histoire et je suis d’avis que l’histoire nous permet de comprendre où nous sommes aujourd’hui, dans le présent. Elle nous permet aussi d’envisager à quoi peut ressembler demain, notre futur.

 

Il y a beaucoup d’exemples que j’aurais pu donner, mais celui que j’ai trouvé le plus intéressant, c’est le cas de Monsieur Loustau, qui remonte à l’époque où nous étions sous l’occupation française. Il s’agit d’un cas au pénal où M. Loustau est trouvé coupable, en décembre 1778, à Maurice. Étant employé de l’administration de l’époque, il est trouvé coupable de « receiving monies that were not destined to him », et de faux en écriture.  

 

Le fait surprenant et exceptionnel, c’est qu’à l’époque, sous l’occupation française, on avait déjà une cour de première instance à Maurice, et une cour d’appel. Les deux étaient à Maurice, mais la cour d’appel finale était, comme elle l’est aujourd’hui, à l’étranger. Comme nous étions sous l’occupation française, la cour d’appel, c’est la cour de cassation de l’époque. Je le répète : nous sommes en 1778, et c’est une époque tout à fait particulière dans l’histoire de France, et donc cet appel doit aller en cour de cassation. 

En prenant connaissance de ce cas, cela m’a fait réfléchir et j’ai fait des recherches pour en savoir plus. Il se trouve qu’en 1778, le moyen de transport, c’est le bateau à voile. Le ‘steam engine’ est inventé après, et ce n’est que bien après – plusieurs dizaines d’années après – qu’il est commercialisé. Et donc, à l’époque de Monsieur Loustau, on dépendait du vent. 

 

Il a donc fallu que les dossiers prennent le bateau, entre trois et six mois, dépendant justement des vents favorables ou pas, pour arriver en France. Le point absolument étonnant est que M. Loustau a logé son appel en janvier 1779, et il a reçu le jugement en janvier 1781, avant d’être reconduit à son poste en juillet 1781. Donc, entre l’appel qu’il a logé en janvier 1779 et le jugement, en 1780, cela fait deux ans. Je ne pense pas qu’on pourrait faire plus vite de nos jours. Je suis même assez sûr qu’on ne le fait pas aussi vite dans beaucoup d’affaires.

 

Ce qui nous amène à la question: Que faisons-nous de toute cette technologie qui nous entoure ? Les moyens technologiques de Monsieur Loustau, c’étaient les voiles, le bois et le vent. Voilà un exemple précis de comment on peut se servir d’un fait historique pour se projeter dans l’avenir. 

 

Si c’était possible à l’époque de le faire en deux ans, je suis sûr qu’aujourd’hui, on devrait pouvoir faire bien mieux, même s’il y a plus d’appels. Bien sûr qu’il y a plus de dossiers, mais la technologie est aussi absolument incomparable, et pourtant, nous ne l’utilisons pas assez.

 

C’est à l’avocat de faire le travail, pas à la machine. 

 

Où en sommes-nous, justement, dans cette transformation numérique de notre judiciaire? À quel point la technologie est-elle présente? 

Cela va dépendre dans quelle cour nous nous situons, mais c’est très faible, dans la mesure où nous considérons les cours de justice dans leur ensemble. Nous n’avons pas beaucoup recours à la technologie que j’appellerai moderne. 

 

Si on prend, par contre, l’exemple de la division commerciale de la Cour suprême, elle est dotée d’un système de ‘e-filing’ depuis 2010. Un système pour loger la procédure en cours. Un avoué n’a plus besoin de marcher et d’aller physiquement déposer des papiers. Ils sont scannés et téléchargés sur le système. 

 

C’est à peu près la seule partie de notre judiciaire qui est digitalisée. Par exemple, pour le procès lui-même devant cette même instance, il va falloir que le dossier soit imprimé. Ce serait bien qu’il puisse y avoir la logistique et les technologies nécessaires pour l’utilisation des versions numériques des dossiers dans les salles d’audience.  

 

Cela étant dit, il est à souligner que  l’administration de la Cour suprême a récemment annoncé l’extension de l’e-filing dans le cadre de l’e-judiciary. C’est une étape intéressante. 

 

Parlant du pourcentage de digitalisation, c’est intéressant de faire un constat au niveau du Conseil privé du Roi d’Angleterre, qui fait partie de notre système judiciaire comme recours final. 

 

Le Conseil privé se trouvant à Londres, il bénéficie de la technologie qui est en place à Londres. C’est la Cour suprême anglaise, après tout. La première fois que j’ai paru dans une équipe d’avocats au Conseil privé remonte à 12 ans. J’ai par la suite eu l’occasion de voir la progression sur le plan de la technologie lors des autres affaires dans lesquelles j’ai paru au Conseil privé. Le plus récent remonte au mois de janvier de cette année. 

 

Sur combien d’années situez-vous la progression au Conseil privé? 

En 2012, il était possible de communiquer les dossiers sous format PDF, mais il fallait à tout prix soumettre des dossiers physiques pour les 5 juges et les différentes parties concernées, qui sont en moyenne au nombre de trois. Les dossiers peuvent être énormes et en plusieurs volumes. Cela faisait un volume de papier colossal.

 

Il y avait, en 2012, une juge – Lady Hale – qui était la seule à ne travailler que sur son laptop. Les autres juges étaient encore au papier. Donc, il fallait avoir deux types de dossiers (le brief). Celui qui devait être physique, et un autre en format électronique. 

 

Quand on faisait référence aux numéros des pages, à l’époque, nous disions que dans le dossier physique, c’était la page 219, et dans le dossier électronique, à une autre page. Une différence liée aux formats. 

 

Deux à trois ans après,  ils étaient deux juges à être « digitalisés ». Et ensuite, j’ai vu qu’ils étaient trois. 

 

En janvier 2024, il n’y a plus de papier. Il n’y a même pas la possibilité de soumettre, à la dernière minute, un document physique, lorsque par exemple, nous avons trouvé un précédent qui pourrait aider. Il nous faut envoyer le document par e-mail. On ne peut plus venir avec le papier. 

 

Donc, au niveau du Conseil privé, nous sommes aujourd’hui à un stade très avancé de la transformation digitale.

 

Si le judiciaire n’est pas digitalisé, il n’y aura pas d’intelligence artificielle.

 

 

 

Cela vous arrive-t-il, ici, de faire parvenir un e-mail à un magistrat d’une cour de district ou de cour intermédiaire?

Oui, ça arrive. 

 

Est-ce une pratique acceptée ? 

C’est accepté. C’est maintenant une pratique qui se met en place depuis quelque temps. Depuis quelques années, il existe une pratique de plus en plus courante, qui est la soumission des plaidoiries par e-mail. Nous n’avons plus besoin d’imprimer. C’est un grand pas en avant. 

 

Il s’agit donc de la forme écrite des plaidoiries…

Oui, c’est bien cela. Avant, il fallait aussi imprimer les autorités, pour les besoins des plaidoiries. Il s’agit de jugements de 15 pages chacun et vous en avez une dizaine comme référence. Devant une cour de deux juges et trois parties, cela fait quand même un nombre important de papiers à imprimer et à soumettre. Maintenant, il y a une seule plaidoirie à imprimer pour les besoins du ‘Registry.’ Nous pouvons ainsi communiquer le reste électroniquement. 

 

Dans les affaires en première instance, par contre, où on appelle des témoins, tous les documents, les preuves, doivent être physiques. Il n’y a pas encore le système en place pour que vous puissiez soumettre les éléments de preuve et les nombreux documents électroniquement.

 

Revenons à votre exemple de la digitalisation du Conseil privé. Où situez-vous notre système judiciaire?

Je pense que nous sommes très loin, mais il faut faire attention. « Digital transformation, adopting new technologies », n’est pas facile à implémenter, puisque nous parlons ici d’infrastructure. C’est un chantier qui nécessitera des investissements importants et une approche nationale. 

 

Pourriez-vous élaborer?

La première chose, pour une stratégie nationale, demeure la planification. Il faut faire un état des lieux des infrastructures existantes et réunir tous les ‘stakeholders’. En premier, il faudra un expert en technologie. Ce n’est certainement pas moi, qui suis avocat, ni mes confrères, ni les juges qui vont faire ce travail. Il sera question de ‘hardware’, et ensuite du ‘software’. Cela implique une mobilisation de ressources financières conséquentes.

 

Nous savons aujourd’hui, par exemple, que les licences coûtent très cher. Votre magazine est électroniquement disponible, vous vivez dans un monde très moderne et vous savez très bien que ce monde moderne coûte ce que ça coûte.

 

Il faut que ce soit accompagné d’un constat, avec les juges, les magistrats, les avocats, les avoués, les huissiers, etc. Les gens ne le savent peut-être pas, mais l’avocat a un rôle très différent de l’avoué, qui lui a un rôle très différent du juge et du magistrat, qui ont un rôle très différent de l’huissier. Chacun des métiers du judiciaire aura son point de vue spécifique sur ce qu’il faut faire et comment le faire. Et bien sûr, il faut que l’État soit complètement partie prenante. Une cour de justice est un service public. 

 

En France, le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, a créé une ‘task force’ pour la transformation numérique du judiciaire. Il a élaboré un rapport qu’il a remis au comité des États généraux de la justice le 17 mars 2022. Je vous donne un exemple de ce qu’il nous faudra (Ndlr: il nous désigne l’écran de son ordinateur portable, où s’affiche le rapport du ministre Dupond-Moretti). Regardez, il y a ici la liste des membres de la ‘Task Force Numérique.’

 

Même en France, ils disent dit ‘task force’…

Oui, même en France. Mais par contre, le ministre français ne dit pas « digitalisation », il dit « dématérialisation ». C’est pas mal. C’est un joli mot. C’est bien dit. 

 

A Singapour, ils ont la Singapore Academy of Law – une agence qui est pour le développement de la Singapore Legal Industry – qui, en 2017, a fait tout un papier sur la Legal Technology Vision 2017

 

Je terminerai par ce qui est, pour moi, l’exemple le plus frappant. Il s’agit de Monsieur Richard Susskind, qui est très connu dans le monde légal comme étant « the leading voice on the future of law ». C’est un auteur qui a écrit de nombreux livres sur la question, et par exemple, il était l’invité de MARC (Ndlr : Mediation and Arbitration Center Mauritius) l’année dernière, pour l’Annual Conference of the Mauritius Bar Association. Il a participé digitalement à travers une vidéo conférence et c’était très intéressant d’apprendre que  Monsieur Richard Susskind est l’IT adviser to the Lord Chief Justice of England and Wales depuis 1988. 

 

C’est ce qu’il nous faut à Maurice : une stratégie nationale avec un expert comme ‘IT adviser’ pour le judiciaire. Il ne nous faut pas de ‘small ad hoc measures’. Je ne dis pas qu’elles sont inutiles, dans la mesure où c’est toujours une bonne chose d’aller de l’avant. Mais en référence à ce qui se fait ailleurs, comme mentionné plus haut,  je pense qu’il nous faut une approche nationale.  

 

Il faut que les régulateurs, de par le monde, fassent des lois pour réguler davantage l’intelligence artificielle.

 

A quoi devrait ressembler ‘the future of law à Maurice?

Nos cours doivent être en mesure d’être complètement digitalisés. Il nous faudra aussi un code de déontologie et la logistique nécessaire, ainsi que les ‘software’ adaptés. 

 

Il devrait y avoir une interface digitale pour les avocats et les avoués. En ce moment, seul les avoués ont une interface digitale avec l’e-filing. Je vous parle maintenant de la possibilité de digitaliser un cas dans son intégralité. Il ne faut pas oublier que tout cela nous mène vers un objectif : un service pour le public. Le service n’est pas pour les avocats. Le service est là pour ceux qui ont besoin de la justice. Qu’ils puissent y avoir accès, de chez eux, à travers leur ordinateur portable où à travers leur téléphone. Il faut donner la possibilité de consulter et de comprendre les procédures. Il ne faut pas que le judiciaire reste quelque chose de mystérieux. 

 

Donc, au final, ce serait bien que le client puisse voir ce qui se passe au sujet de son dossier, et qui s’occupe du dossier. Il peut s’agir de son emploi, son contrat, sa maison, sa situation… Il faut surtout ne pas oublier que le but principal est le service du judiciaire au public, au justiciable.

 

On entend souvent ce fameux adage qui veut que « Justice delayed is justice denied ». La digitalisation fait-elle partie de la solution ?

Absolument. C’est une partie de la solution. Il y a des études qui démontrent que la digitalisation ferait économiser un tiers du temps des procédures. La digitalisation s’inscrit définitivement comme une solution. Mais digitalisation veut dire beaucoup de choses. Il y a des études qui démontrent que l’intelligence artificielle peut également être utile pour le ‘case management system’

 

Nous entendons beaucoup dire que le futur, c’est l’intelligence artificielle. J’ai envie de dire : « Attendez, l’intelligence artificielle, dans le judiciaire, c’est après-demain. Il faut déjà qu’on arrive à demain. On a pour l’instant un peu mal avec aujourd’hui. Allons planifier demain et l’intelligence artificielle fera partie du plan. Si on n’est pas digitalisé, il n’y aura pas d’intelligence artificielle ». 

 

Puisque nous abordons la question de l’intelligence artificielle, nous avons appris, lors d’une récente conférence de la Techverse, les mésaventures de deux avocats de New York ayant fait usage de ChatGPT dans la préparation de leurs dossiers. Avez-vous une appréhension quant à l’utilisation de l’intelligence artificielle dans le domaine légal?

Non, pas du tout. Je pense que l’intelligence artificielle va être une très bonne chose. Elle va amener beaucoup de positifs. Il y aura bien sûr, comme pour toute chose, du négatif. Ce n’est pas l’avènement de l’intelligence artificielle qui a inventé les copieurs, les tricheurs ou les paresseux. Le manque de professionnalisme a toujours existé. Moi, je suis de ceux qui pensent que l’intelligence artificielle va grandement aider, et aide déjà énormément. 

 

Je n’utilise certainement pas ChatGPT pour écrire mes plaidoiries ou pour faire mes recherches, ni pour lire les documents à ma place, mais l’outil reste très utile. 

 

L’application Adobe PDF, par exemple, a un nouveau système intéressant. L’application fait maintenant des résumés. Est-ce que ça peut être utile ? Bien sûr que ça peut être utile à un avocat, mais seulement après avoir lu le document intégralement. 

 

En ce qui concerne ChatGPT, je pense qu’il y aura un peu de ‘bad press’, par rapport aux gens qui l’utilisent mal, par exemple. Moi, je l’utilise régulièrement, comme beaucoup de mes confrères, et mes clients aussi m’en parlent. Je suis avocat d’affaires, et dans le monde des affaires, les gens utilisent ChatGPT. C’est commun. Les plus grands directeurs, les plus grands chefs d’entreprise, utilisent l’intelligence artificielle. C’est l’avenir !

 

Que pensez-vous de ce scénario futuriste où un confrère fait la requête suivante à ChatGPT dans la préparation d’un dossier : « ChatGPT, how would lawyer Eric Ribot write his submissions in the following matter? » ou encore « ChatGPT, write a submission with the content below, using lawyer’s Eric Ribot’s style » ? 

Ça, c’est pas mal comme question ! Oui, l’intelligence artificielle peut effectivement être utilisée pour écrire dans différentes voix, différents styles. Par rapport à cela, je pense qu’il y a plusieurs défis. Il y a premièrement le côté professionnel, le professionnalisme de la personne, qui entre en jeu, comme dans toute chose, dans tout ce qu’on utilise. Il y a aussi un autre souci, dans la mesure où il  y a un manque de lois et de régulations entourant l’intelligence artificielle.

 

C’est décrié dans le monde entier. Ils ont absolument raison. Le plus gros problème demeure les infractions aux ‘intellectual property rights’. Les droits d’auteurs. Si vous me posez la question de savoir si c’est un problème, ma réponse est clairement oui, c’est un problème. Est-ce que moi, j’ai réfléchi à une solution ? Certainement pas, mais je pense que la technologie est allée plus vite que les législateurs. 

 

Vous êtes avocat. Vous avez donc un code d’éthique, des garde-fous, etc. Comme dans tout métier, il y a malheureusement des exceptions. La technologie progressant rapidement, il y aura forcément un cas où quelqu’un  demandera à l’IA, « How would lawyer x prepare this case ? » Ne devrions-nous pas avoir cette prise de conscience au niveau de la profession légale?

Il faut définitivement une prise de conscience. La technologie se développe effectivement à une vitesse incroyable. Plus on l’utilise, plus elle se développe. Et comme le monde entier est en train de l’utiliser, cela va aller vite. 

 

Il faut que les régulateurs, de par le monde, fassent des lois pour réguler davantage l’intelligence artificielle. Le problème est encore plus complexe dans la mesure où il s’agit d’une utilisation internationale. Nous aurons besoin de règlements internationaux. Je sais que l’Union européenne est en train de travailler sur la régularisation de l’intelligence artificielle. Vous avez tout à fait raison de souligner, à travers vos exemples, qu’elle pourrait être une source de difficultés, et que nous devrions chercher à établir des garde-fous. 

 

Je reviens sur le fait que la digitalisation n’équivaut pas à l’intelligence artificielle, mais c’est un sujet qui est intéressant. Je m’intéresse à comment, de nos jours, la technologie va s’intégrer dans notre profession et dans nos cours de justice. 

 

On parlait de quelqu’un – un professionnel ou autre – qui peut dire : « Ecrivez-moi quelque chose dans le style d’untel ». Ce à quoi il faut aussi faire attention, ce sont les justiciables, justement, qui demanderaient à ChatGPT : « Give me some legal advice ». (Ndlr: éclats de rires).

 

Moi, j’ai fait un test, et je peux vous dire que ChatGPT invente des précédents. Premièrement, c’est un ‘overview’, pas vraiment très précis et parfois de mauvaise qualité. Cela peut être utile comme un début de réflexion. Et deuxième constat : ChatGPT peut vous dire que le ‘leading case’ sur la question, c’est XYZ, qui en réalité n’existe pas. Il faut donc faire attention. C’est à l’avocat de faire le travail, pas à la machine.

 

Pas mal de gens consultent Google pour obtenir des avis médicaux mineurs… 

Moi, j’ai une seule chose à dire dessus. Trouvez-vous un bon médecin et faites-lui confiance. C’est la même chose pour les professionnels et les avocats. 

 

J’ai écouté un podcast du CEO de ChatGPT, Sam Altman. Je ne suis pas en mesure de vous faire un résumé complet, mais il disait que l’intelligence artificielle va accentuer les relations humaines et aussi accentuer ce qui rend l’être humain unique. Pour lui, l’intelligence artificielle est un outil, et c’est comme ça qu’il faut le percevoir. 

 

Je suis d’accord avec ce Monsieur. L’intelligence artificielle va démontrer quelle est la qualité que nous possédons qui nous rend uniques. Cela est vrai pour les professionnels, aussi bien que pour tous les êtres humains. Qu’est-ce qui est vraiment important? Je pense qu’il s’agit de notre individualité et du lien que nous pouvons avoir les uns avec les autres.

 

Mais bon, pour l’instant, il nous faut d’abord et en urgence s’organiser pour digitaliser davantage notre judiciaire.

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