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W. Johann Schmonsees,
porte-parole francophone du Département d’État américain

“La sécurité économique va de pair avec la sécurité nationale”

  • « Les États-Unis s’engagent à verser 4 milliards de dollars au cours des trois prochaines années à l’Association internationale de développement (IDA) de la Banque mondiale. »

Le Sommet du G20 à Rio a offert une plateforme pour discuter de plusieurs enjeux majeurs, notamment la lutte contre la pauvreté, la sécurité alimentaire et les défis climatiques. W. Johann Schmonsees, porte-parole francophone du Département d’État américain et directeur du Centre régional des médias pour l’Afrique, revient sur les résultats de cet événement. Dans cet entretien accordé à BIZWEEK, il aborde les priorités des États-Unis, telles que le financement climatique, l’allégement de la dette et le rôle des institutions multilatérales, tout en évoquant les implications possibles pour les pays en développement, y compris les petits États insulaires comme Maurice.

Quels ont été, selon vous, les principaux résultats du Sommet du G20 à Rio cette année ?  

Le Sommet du G20 s’est achevé ici, à Rio, sur de nombreuses notes positives. Les États-Unis ont participé au lancement de l’Alliance mondiale contre la faim et la pauvreté, qui vise à donner une dynamique politique durable à l’accélération de l’éradication de la pauvreté. Notons aussi l’engagement historique tenu d’augmenter notre financement climatique international à hauteur de 11 milliards de dollars par an. Ensuite, concernant l’allégement de la dette, le président a appelé les pays du G20 à l’accorder rapidement aux pays qui en ont besoin, afin de réduire les difficultés des populations des pays endettés. Car trop de nations sont obligées de choisir entre investir dans l’avenir et rembourser leur dette.

 

La corruption était aussi à l’agenda. Les États-Unis font pression en faveur de mesures plus fermes pour prévenir et lutter contre la corruption, et garantir des institutions publiques transparentes, inclusives et responsables. Le G20 a le pouvoir d’ouvrir une nouvelle ère de développement durable pour ceux qui en ont le plus besoin. Tout cela peut sembler ambitieux, mais c’est pourtant réalisable.

 

Y a-t-il eu des décisions marquantes concernant les grands défis mondiaux, comme le changement climatique ou la relance économique post-pandémie ?  

Les pays se sont mis d’accord pour investir à grande échelle pour aider les pays à atteindre les objectifs de développement durable et à relever les défis mondiaux. Nous avons accompli des progrès notables en renforçant la puissance de feu des banques de développement multilatérales afin qu’elles aient davantage de ressources pour relever les défis, tels que les pandémies et le changement climatique.

 

Les États-Unis font pression en faveur de mesures plus fermes pour prévenir et lutter contre la corruption, et garantir des institutions publiques transparentes, inclusives et responsables. 

 

Quelles sont les implications des discussions du G20 pour les économies africaines, en particulier en matière de commerce et d’investissement ?  

Le système alimentaire mondial est confronté à des défis sans précédent. Plus de 700 millions de personnes sont en situation de malnutrition, et les retards de croissance et les carences en nutriments parmi les enfants sont très répandus dans les pays en développement. D’ici 2050, la demande alimentaire pourrait augmenter de plus de 50 % en Afrique subsaharienne et de 25 % au niveau mondial. Dans le même temps, le changement climatique et la dégradation des sols entraînent une baisse des rendements agricoles.

 

Les États-Unis s’emploient avec leurs partenaires à renforcer la sécurité alimentaire. Nous sommes le plus grand pays donateur au monde – nous finançons l’équivalent d’un dollar sur trois des opérations mondiales du Programme alimentaire mondial, et nous avons fourni l’équivalent de 17,5 milliards de dollars d’aide alimentaire depuis 2021, en plus de nos investissements à long terme dans la prévention de la faim.

 

Nos initiatives phares Feed the Future et la Vision pour des cultures et des sols adaptés (VACS) fournissent aux agriculteurs des pratiques agricoles et des technologies novatrices qui les aident à renforcer leur résilience face au changement climatique. La VACS est devenue un mouvement mondial qui s’étend de l’Afrique subsaharienne aux Amériques et aux îles du Pacifique. En septembre 2024, la VACS a annoncé une aide à la sécurité alimentaire de 5 millions de dollars au Guatemala, laquelle soutiendra les 1,6 million de personnes qui jouent un rôle dans le secteur agricole et qui en dépendent.

 

Y a-t-il eu des engagements spécifiques pour soutenir les pays en développement ou des initiatives visant à réduire la dette ?

Nos efforts collectifs ont permis de renforcer la capacité des institutions financières internationales à soutenir les pays face aux chocs climatiques, aux défis de santé publique et aux situations d’endettement difficiles. Il faut que les créanciers et les débiteurs remplissent chacun leur rôle de façon à ce que les situations d’endettement insoutenables soient traitées en temps opportun et de manière ordonnée et transparente. Nous voulons que les prêts opaques et non durables soient remplacés par des financements transparents, durables et résilients.

 

Comment évaluez-vous l’état actuel de la coopération internationale, notamment entre les grandes puissances comme les États-Unis, la Chine et l’Union européenne ?

Les États-Unis considèrent que tous les pays peuvent choisir les pays et les groupements avec lesquels ils s’associent. En même temps, nous sommes fermement convaincus de l’importance de tous les groupements multilatéraux pour la promotion des principes de la Charte des Nations unies, tels que le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale, ainsi que la Déclaration universelle des droits de l’homme et les Objectifs de développement durable. Les États-Unis et leurs partenaires sont déterminés à renforcer les institutions existantes du système international afin de les rendre plus inclusives et plus à même de relever nos défis mondiaux communs. Nous nous attachons à renforcer nos relations existantes et positives, y compris avec de nombreux pays avec lesquels nous travaillons dans le cadre d’autres institutions multilatérales telles que le G20, l’OCDE et l’APEC.

 

Le système alimentaire mondial est confronté à des défis sans précédent. Plus de 700 millions de personnes sont en situation de malnutrition 

 

Le sommet a-t-il permis de renforcer les alliances stratégiques sur des questions clés telles que la sécurité alimentaire ou l’énergie ?  

Comme le dit le secrétaire Blinken, « le plus grand atout stratégique de l’Amérique, ce sont ses alliances et ses partenariats », ce qui inclut ses partenariats avec le secteur privé. Nous travaillons en partenariat avec une gamme variée d’acteurs du secteur privé dans notre pays et à l’étranger, notamment des organisations à but non lucratif, des fondations, des universités, des groupes de la diaspora, des petites entreprises et des groupes de réflexion.

 

Quelles ont été les principales priorités des États-Unis lors de ce sommet, et dans quelle mesure ces objectifs ont-ils été atteints ?  

Les États-Unis ont mis l’accent sur des questions comme l’avenir technologique, notamment sur l’utilisation responsable de l’Intelligence Artificielle, mais aussi sur la transition énergétique. La sécurité alimentaire et sanitaire pour toutes et tous, ainsi que l’inclusion des femmes, qui est fondamentale dans tous les aspects du développement durable, étaient également au programme. Enfin, pour la question de la dette, nous voulons que les prêts opaques et non durables soient remplacés par des financements transparents, durables, et résilients.

 

Tous les grands points ont été traités sérieusement, lors du sommet, par les pays partenaires.

 

Y a-t-il des initiatives concrètes que les États-Unis souhaitent mettre en œuvre suite aux discussions du G20 ?  

 La sécurité économique va de pair avec la sécurité nationale. Nous collaborons avec des partenaires au sein du gouvernement américain et du monde des affaires aux États-Unis afin de promouvoir les opportunités économiques et de stimuler la prospérité dans notre pays et à l’étranger. Le président américain et les dirigeants du G7 ont lancé le Partenariat pour l’investissement dans les infrastructures mondiales (PGI) lors du sommet des dirigeants du G7 de 2022, afin de débloquer quelque 600 milliards de dollars pour des projets d’infrastructure de haute qualité et respectueux de l’environnement, qui amélioreront l’accès aux marchés, soutiendront l’esprit d’entreprise, créeront des emplois et donneront des moyens d’action aux populations.

 

Les États-Unis investissent dans des infrastructures durables et de qualité – routes, énergie propre, câbles à fibre optique – par le biais du Partenariat pour l’investissement dans les infrastructures mondiales (PGI). Centré sur l’investissement, en plusieurs phases, dans les transports, mais axé sur la mobilisation des investissements du secteur privé dans de multiples secteurs, le PGI a annoncé plus de 3 milliards de dollars de financement de la part du gouvernement américain à destination de projets liés aux transports, à l’agriculture, à la connectivité numérique, aux énergies propres et aux chaînes d’approvisionnement en énergie propre en Angola, en RDC et en Zambie, et il étudie actuellement la possibilité de s’étendre à la Tanzanie.

 

Le corridor économique de Luçon est le premier corridor économique du PGI dans la région indopacifique. Le corridor soutiendra la connectivité entre Subic Bay, Clark, Manille et Batangas, et il facilitera des investissements stratégiques et d’ancrage au sein de chaque pôle dans des projets d’infrastructure à fort impact, notamment les chemins de fer, la modernisation des ports, l’agro-industrie ainsi que les chaînes d’approvisionnement de l’énergie propre et des semi-conducteurs, et leur déploiement.

 

Selon vous, quel rôle le G20 peut-il jouer pour favoriser une croissance inclusive et durable dans un monde de plus en plus polarisé ?

Les forums comme le G20 procurent aux États-Unis une tribune qui leur permettent de dialoguer directement avec les plus grandes économies avancées et émergentes du monde en vue de promouvoir les intérêts américains et de relever les défis géopolitiques et socio-économiques mondiaux. Les membres du G20 représentent plus de 80 % du PIB mondial, trois quarts du commerce mondial et deux tiers de la population mondiale.

 

Quels sont les défis majeurs qui subsistent après ce sommet, et comment peuvent-ils être abordés dans les prochains mois ?

Nous devons maintenant veiller à ce que la Banque mondiale puisse poursuivre son travail dans les pays les plus vulnérables. Les États-Unis s’engagent à verser 4 milliards de dollars au cours des trois prochaines années à l’Association internationale de développement (IDA), de la Banque mondiale. L’IDA est une intervenante de première ligne auprès des pays les plus pauvres du monde. En outre, nous devons mobiliser des capitaux privés à l’échelle des besoins. Dans ce fonds, les États-Unis ont mobilisé 60 milliards de dollars par le biais du Partenariat pour l’investissement dans les infrastructures mondiales. Ce partenariat changera la donne en matière de sécurité alimentaire, en particulier dans le corridor de Lobito, en Afrique.

 

Les Petits États Insulaires (PEI), tels que Maurice, font face à des défis uniques liés à leur vulnérabilité économique et climatique. Quels résultats du Sommet du G20 pourraient avoir un impact direct ou indirect sur ces nations, notamment en matière de financement climatique, de sécurité alimentaire ou d’intégration commerciale ?

Alors que nous nous efforçons de réduire les émissions de GES et de nous adapter aux impacts climatiques, nous nous efforçons également d’aider les pays en développement particulièrement vulnérables à éviter, minimiser et remédier aux pertes et dommages.

 

Nous avons également promis 4,5 millions de dollars pour le Pacific Resilience Facility (PRF), ainsi que 2,5 millions de dollars pour le réseau de Santiago. L’engagement initial des États-Unis de 4,5 millions de dollars pour le PRF a été augmenté d’un engagement supplémentaire de 20 millions de dollars lors de la réunion des dirigeants du Forum États-Unis-îles du Pacifique en août 2024, sous réserve de notification au Congrès et de l’achèvement des procédures nationales.

 

Les États-Unis continueront également de soutenir d’autres efforts pour aider les plus vulnérables à répondre aux impacts climatiques, tels que le rétablissement et la reconstruction après des événements climatiques extrêmes, l’augmentation de la marge de manœuvre budgétaire, la gestion des impacts des événements à évolution lente tels que l’élévation du niveau de la mer, et le travail sur les questions politiques connexes.

À propos de W. Johann Schmonsees

 

W. Johann Schmonsees est porte-parole francophone du Département d’État américain et directeur du Centre régional des médias pour l’Afrique. Ce diplomate de carrière a occupé plusieurs postes d’adjoint et de chef intérimaire, et a géré des opérations consulaires à l’étranger. Également arabophone, il a siégé au conseil d’administration de deux écoles internationales américaines, à Riyad, en Arabie Saoudite, et à Mascate, la capitale du sultanat d’Oman.

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